Édito – ESSayons l’ESSpoir : Appel à vigilance démocratique !
Dans sa séance plénière du 28 mai dernier, le Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) a adopté à l’unanimité un avis intitulé « Renforcer le financement des associations : une urgence démocratique 1 ».
Parmi ses 20 préconisations, ce rapport recommande à l’État et aux instances publiques d’« accroître le soutien financier des pouvoirs publics aux associations et prioriser la subvention en préservant celles-ci des règles de la concurrence » et d’« abroger le contrat d’engagement républicain instauré en 2021 et de lui substituer la charte d’engagements réciproques entre l’État, les collectivités territoriales et le monde associatif ».
Nous ne pouvons qu’adhérer à ces orientations alors que nous avons à déplorer le désengagement de nos communautés de communes dans le financement des associations de nos territoires et que nous avons déjà eu l’occasion de préciser les dérives portées par le contrat d’engagement républicain. Elles menacent la liberté d’opinion et les mobilisations citoyennes pour un monde meilleur, pour une certaine conception du progrès social, de l’émancipation des personnes au profit d’une responsabilité vraiment solidaire et pleinement politique au sens le plus noble de ce terme.
Il est des moments où il est nécessaire de redire ces fondamentaux et leur redonner du sens.
Ce qui se joue au présent et pour notre avenir, c’est la pérennité d’une économie sociale et solidaire à la hauteur des mobilisations qui l’ont construite dans les luttes ouvrières du XIXe siècle. Des exemples récents nous prouvent malheureusement qu’il y a de multiples moyens pour remettre en cause des projets essentiels pour l’intérêt général dont ceux que nous venons de citer mais on peut également parler de bien d’autres : la privatisation spéculative des services publics, la « prégnance du « new public management » et des règles européennes de la concurrence 2 », les arbitraires technocratiques, etc.
Mais, plus largement, c’est l’accroissement permanent des inégalités, le sacrifice des territoires périphériques et de ses populations, le sentiment d’impuissance face aux multiples périls, notamment environnementaux, qui fondent les peurs, les replis fatalistes. Nous sommes confrontés aujourd’hui, comme dans d’autres pays, au risque d’une remise en cause de notre démocratie. Il est déjà en action, les circonstances présentes nous le font mieux voir et comprendre qu’elle peut encore s’accroître. C’est pourquoi il faut s’engager pour éviter le pire et travailler « pour la suite du monde 3 » !
1 Rapporteur.e.s : Martin Bobel et Dominique Joseph.
2 Citation extraite du rapport du CESE. Le « new public management » appartient au vocabulaire de la « réingénieurie » d’origine nord-américaine qui remet notamment en cause les services publics en s’alignant sur le modèle concurrentiel ultralibéral et son « efficience ».
3 Pour reprendre le titre du chef-d’œuvre documentaire québécois de Pierre Perrault, Michel Brault et Marcel Carrière qui montre la vie quotidienne des pêcheurs de l’Isle-aux-Coudres en 1962.